“La question de la production est encastrée dorénavant dans une autre : celle des conditions d’habitabilité de la planète.”¹

“Le fameux “sens de l’histoire”, qui était supposé emporter toute la planète vers la modernité globalisée, est d’une part à sens unique, et, d’autre part, étonnamment vague sur le but à atteindre. C’est quoi le pays de la modernisation ? Il est où ? Il y fait quelle température ? On y mange quoi ? On y vit de quoi ?”¹

C’est ainsi que Bruno Latour pose la question de notre développement.

Qui a sans doute une résonance particulière auprès des Mineurs.

D’abord, du fait de leur formation scientifique et de leur ancrage dans les activités de production. Avec un dilemme : il faut avoir confiance dans la science pour trouver des solutions, donc le modèle est viable, ou il y a suffisamment d’indicateurs au rouge, donc le modèle doit changer.

Ensuite, du fait de leurs responsabilités présentes ou à venir dans le monde professionnel et dans la société. Avec l’impact qu’ils ont chaque jour au travers des actions qu’ils mènent en entreprise, en projet, en équipe, en expertise, en innovation, en recherche, en association.

Si, au tout début du 21^e siècle, la France et les pays européens pouvaient encore vivre dans l’illusion d’une relative protection et s’affranchir d’une remise en cause, l’accélération et la gravité d’événements majeurs ces dernières années cassent les certitudes. Crise des subprimes, montée du populisme, fragmentation de la société, Covid, guerre en Ukraine, rupture des approvisionnements en énergie, événements climatiques extrêmes, effondrement de la biodiversité.

Il devient difficile de dire “après la crise, la reprise viendra”, le paradigme est autre.

Comment, dans ce contexte, les Écoles et les Associations d’Alumni réagissent-elles ? Comment font-elles évoluer leurs formations, leurs missions, leurs réseaux ? Que veulent-elles construire pour demain avec les élèves, le corps enseignant, les centres de recherche et les Alumni ?

Avec ce numéro puis les 2 prochains, la Revue a choisi de donner la parole aux directeurs des Écoles et aux présidents des Associations, sous la forme d’entretiens menés conjointement par un élève et un ancien élève.

Relisons ou lisons Bruno Latour. Écoutons dans leurs entretiens, les orientations de François, Jean-Yves, Vincent, Philippe, Jacques et Stéphane.

Avoir les idées claires est une partie du chemin.

Bonne lecture. Et bonne fin d’année.

DIDIER PERRIN (P85), Rédacteur en Chef

1- Entretien avec Bruno Latour, par Nicolas Truong, Le Monde, 10 décembre 2021